Tapa, umu hei et monoi sur l’île de Fatu Hiva

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Dernier extrait du carnet de voyage de Paul Simier en Polynésie française. Au moment où les marins de l’Aranui 3 mettaient les baleinières à la mer, les falaises qui bordent le village de Omoa étaient noyées dans le brouillard. Le ciel, sombre et lourd, a soudainement craqué, libérant une trombe d’eau le temps que dure le débarquement. Puis le soleil est réapparu, comme au premier jour du monde.

La population de 600 habitants que compte Fatu Hiva, l’île située à l’extrême sud-est de l’archipel des Marquises, se partage entre Omoa et Hanavave, deux villages nichés dans des vallées ouvrant sur des baies que le cargo mixte ravitaille tour à tour.

À Omoa, les sculpteurs exposaient leurs oeuvres finement ciselées dans des bois durs et précieux ou encore dans des os de mammifères pour les plus petites pièces.

Comme il est d’usage dans tout l’archipel, le visiteur peut tout à loisir regarder, et toucher les pièces exposées sans que jamais on le pousse à acheter ni qu’on insiste de quelque façon. Chacun des artistes se fait un plaisir d’expliquer sa technique et d’échanger avec les visiteurs, y compris ceux qui n’ont aucune intention d’acheter.

Fabrication du tapa


Les croisiéristes de l’Aranui 3 se sont répartis autour de deux femmes du village pour une démonstration de fabrication de tapa. En langue marquisienne, le tapa désigne la feuille d’écorce que l’on utilise traditionnellement pour dessiner.

On obtient le tapa en décollant la partie intérieure de l’écorce de l’arbre. Selon l’essence d’arbre utilisée, la couleur varie du clair au foncé.

Une fois décollée, on assouplit la bande végétale à l’aide d’un maillet jusqu’à la rendre souple comme une peau de chamois. Une fois trempée et lavée, on la fait ensuite sécher pour obtenir une feuille rigide pouvant soutenir l’empreinte de l’encre.

Les tapas reproduisant des figures traditionnelles (guerriers, danseuses, statues et motifs de tatouages) figurent partout dans l’archipel des Marquises parmi les créations artisanales proposées aux touristes.

Le bouquet fleuri


Nous avons ensuite assisté à une démonstration de fabrication de umu hei, soit le bouquet fleuri que les Marquisiennes utilisaient jadis comme parfum.

Le bouquet fleuri se compose de plusieurs types d’herbes particulièrement odorantes que l’on parfume d’essence de bois (comme le santal). On les noue ensemble en y intégrant des tranches de fruits.

La femme intègre ce bouquet fleuri à sa longue chevelure nouée en conséquence. Quand le umu hei a fini de dégager ses parfums, il suffit de le renouveler.

Le musée local de Omoa renferme une belle collection de javelots ainsi que d’objets usuels également taillés dans le bois, comme des écuelles et des bassines de toutes les tailles.

L’escale à Omoa fut courte, le cargo mixte devant dans l’après-midi livrer sa marchandise à Hananave. Le temps que le repas soit consommé à bord, l’ Aranui 3 entrait dans la baie des Vierges.

Le paysage est tout simplement grandiose. Des pics aux formes phalliques montent vers le ciel. On raconte que le premier nom donné au lieu était la baie des Verges, appellation que les bons pères venus «civiliser» ces gens et leur enseigner la morale chrétienne trouvèrent choquante au point de la traduire en baie des Vierges.

Toute la population du village de Hanavave était là pour nous accueillir. Au centre communautaire, deux femmes ont, avec leurs seules mains et des outils rudimentaires, produit devant les visiteurs du lait de coco d’abord, que l’on extrait de la noix de coco fraîche, puis du monoi, l’huile que l’on extrait de la noix de coco séchée au soleil (appelée coprah).

Puis, une troupe composée de femmes, d’adolescents et d’enfants des deux sexes s’est mise à danser au soin des tambours que battaient des hommes.

Paul Simier – Journal de Montréal  2007

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