Festival de l’imaginaire : Chants et danses de Nuku Hiva (Îles Marquises) avec Te Hina O Motu Haka

Sous le banian majestueux, s’étend le meae, l’espace sacré où les Marquisiens se réunissaient pour leurs fêtes et leurs cérémonies au rythme des tambours pahu. Au coeur de la célébration, la danse et des légendes qu’hommes et femmes content avec force, douceur, générosité, amour, courage, usant du chant et du geste dans des chorégraphies toujours renouvelées sous les regards attentifs du tuhuka, le maître du savoir, et du tuhuka koika le maître de la fête qui prépare la troupe pour la manifestation.

Îles Marquises, Henua Enana, c’est-à-dire la Terre des Hommes en marquisien. Cet imposant massif volcanique surgi du fond de l’océan il y a quelques milliers d’années ne cesse de hanter les voyageurs dans leur course effrénée vers un horizon jamais atteint et nourrit les fantasmes d’un paradis exotique.

Derrière le rêve, la réalité. Brutalité de l’histoire. Relire Taïpi de Herman Melville, Les Immémoriaux de Segalen et les lettres de Gauguin. Déculturation, acculturation, interdictions en tous genres dont celle de parler la langue maternelle, perte d’identité, de mémoire, population décimée par les maladies, par la tristesse, peuple qui s’est laissé mourir… « parce qu’il ne dansait plus », aurait dit un chef marquisien.

Alors, dans les années 70, quelques jeunes Marquisiens d’exception ont voulu retrouver « une âme » et ont entrepris à travers l’archipel un remarquable travail de collecte auprès des anciens : mémoire des légendes, gestes, rythmes. Et danses. La danse renaît, avec elle l’enthousiasme des nouvelles générations qui trouvent là un terrain idéal pour exprimer leur fierté d’être. Deux noms s’imposent ici, celui de Lucien Kimitete, ancien maire de Nuku Hiva et figure emblématique du réveil marquisien, disparu entre ciel et mer en 2002, et Georges Teikiehuupoko, président de l’Académie Marquisienne qui oeuvre sans relâche, avec beaucoup d’autres, pour réunir et rassembler tout le patrimoine oral.

Les danses marquisiennes se prêtent volontiers à ce renouveau car, au-delà du cadre fixé par la tradition qui décrète que telle danse est statique, comme par exemple le Ruu que les femmes dansent à genoux dans le but de calmer les esprits, ou telle autre réservée aux hommes comme le Putu qui accompagne les chants de bienvenue, elles laissent place libre à l’invention. Selon le thème choisi, la légende racontée, des gestes, des figures chorégraphiques nouvelles surgissent. Elles incarnent des idées, produisent des images et c’est à ce pouvoir d’évocation qu’est jugé le talent des danseurs. L’ordre chronologique des danses, lui, est immuable. Pourtant, les nouvelles générations n’hésitent pas à le bousculer. De la même manière, elles mettent l’accent sur le Haka Toua, impressionnante danse des guerriers que les jeunes gens dansent avec une jubilation quasi jouissive, encouragés par les cris enthousiastes des danseuses alors cantonnées au rôle de spectatrices. Malgré un fond culturel commun, cette danse ne doit pas être confondue avec le Hakka des Maoris de Nouvelle Zélande.

Parmi les danses les plus remarquables, la danse de l’oiseau, Haka Manu, toute en grâce et en douceur, implique une danseuse soliste. Le Maha’u, ou danse du cochon est réservée aux hommes. Elle fut interdite par les missionnaires à cause de ses connotations érotiques et du râle particulier émis par les danseurs. On dit que quand la danse du cochon est bien dansée, les chiens doivent hurler…

Sur chaque île de l’archipel, une ou plusieurs associations regroupent jeunes et moins jeunes qui se retrouvent régulièrement pour danser, se préparer à différents festivals, mais aussi pour créer, ensemble, de nouvelles figures. Te Hina O Motu Haka de Nuku Hiva, est l’invitée de cette 15e édition du Festival de l’Imaginaire où elle présentera une légende, celle de la création des îles Marquises. Une création à découvrir.

Arwad Esber, Directrice du Festival de l’Imaginaire

 

Avec Jacques Poea Haiti, danseur et chorégraphe ; Jacky Kimitete, danseur et chorégraphe ; Max Peterano, danseur ; Yoann Taupotini, danseur ; Venance Taupotini, danseur ; Roland Teatiu, danseur ; Ralph Tetohu, danseur ; Olivier Fiu, danseur ; Aniata Kimitete, danseuse haka manu ; Claire Haiti, danseuse et chanteuse soliste ; Davina Kautai, danseuse ; Mylène Peterano, danseuse ; Guylène Peterano, danseuse et chanteuse soliste ; Dinah Deane, danseuse ; Alice Gendron, danseuse ; Ronald Tihoni, chef musicien ; Taivete Tihoni, percussions ; Huukena Teiki Huukena, percussions ; Colette Tihoni, choriste ; et Débora Kimitete.

Danse de l’oiseau, groupe de Nuku Hiva au Festival des Arts Ua Pou 2007

Dates et horaires Musée du quai Branly :

Vendredi 10 et samedi 11 juin à 20h

Dimanche 12 juin à 17h

En tournée : Le Théâtre – Centre Culturel

Jacques Duhamel de Vitré le mercredi 15 juin à 20 h 45