KAOHA NUI – CARNET DE VOYAGE AUX ÎLES MARQUISES – SÉBASTIEN LEBÈGUE

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     Grandioses, majestueuses, secrètes et fascinantes… les qualificatifs ne manquent pas pour décrire les îles Marquises, cet archipel du bout du monde, la Terre des Hommes…

     C’est à bien davantage, à une plongée au sein même de la vie marquisienne que nous invite Sébastien Lebègue  – globe-trotter, dessinateur, écrivain, photographe  –  à travers ce carnet de voyage, témoignages intensément vécus, au gré de ses pérégrinations, des randonnées et chevauchées ; au hasard des rencontres nombreuses et chaleureuses, vraies toujours, des moments de contemplation, des rêveries aussi…

     Nous vivons l’accueil marquisien et partageons des moments avec les familles ; nous vibrons au rythme du ukulele et des pahu lors des répétitions du grand festival de danse ; nous sentons le poisson grillé à même les pierres nous chatouiller les narines ; nous ressentons l’effort retenu du sculpteur incisant la pièce de bois de sa gouge minutieuse, et celui des chevaux crapahutant dans les rochers à la recherche de traces du passé…

     Ka’oha nui, ce livre est avant tout une aventure humaine, intense ; une découverte culturelle, riche ; et un ouvrage… à feuilleter, doucement ; à déguster, avec gourmandise ; pour partager, à petits pas, le vécu marquisien et les émotions du voyageur…

     L’écriture, précise, descriptive, soutenue par des dessins bien documentés et des aquarelles étalées sur le vif qui s’offrent en de larges doubles pages, nous emmène à croquer chacun de ces instants.

     L’auteur, Sébastien Lebègue, plasticien, photographe et enseignant en arts appliqués a vécu à Tahiti de 2003 à 2007. Il est actuellement installé au Japon. Son travail personnel l’oriente vers une recherche d’une image mémoire que l’on pourrait comparer à la matrice de nos souvenirs. Il tente de quérir un moyen de toucher le moment et de présenter sur un support ses rencontres et partages, ses découvertes culturelles, les moments de vie simple où les sens sont en éveil, où la nature montre sa grandeur. Cela, il le traduit sous diverses formes : des carnets dessinés et annotés, reportages graphiques et photographiques, qu’il propose en lecture ou en espace lors de ces expositions.

    Il révèle ainsi aux spectateurs ses sensations ou visions impalpables du moment, pour les emmener vers une lecture personnelle et vers l’éloignement de l’oubli.

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Première édition 17/10/2010 Format  228 x 223 mm – 366 pages – Couverture cartonnée reliée cousue ISBN  9782915654615

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Tahuata (îles Marquises) en 1774 : Huiles et gravures de William Hodges

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Vue de la baie de la Résolution [Tahuata] dans les Marquises Peinture sur toile 495.3 x 635 mm  © National Maritime Museum, Greenwich, Londres, Ministère de la Défense

Les peintures du Pacifique de William Hodges célèbrent l’exploration britannique. Ce peintre paysagiste a été nommé par l’Amirauté pour enregistrer les lieux découverts au cours du deuxième voyage de Cook entrepris avec la «Résolution» et l’ « Aventure », de 1772 à 1775. Il réalisa principalement des dessins et des croquis  qui ont servis de base pour d’autres plus formels et convertis beaucoup plus tard en gravures dans le récit officiel du voyage de Cook. W. Hodges a également fait quelques peintures à l’huile sur le voyage mais la plupart, en particulier les tableaux les plus grands, ont été peints à Londres à son retour. Le National Maritime Museum détient 26 huiles relatives au voyage, dont 24 ont été peintes pour l’Amirauté ou acquises par elle.

L’objectif principal de Cook lors de cette expédition était de localiser, si possible, le fameux mais inconnu continent austral, et de développer les connaissances des îles du Pacifique central. Les enregistrements de Hodges des profils côtiers ont été en partie importants pour des raisons de navigation.

Cette toile   « View of Resolution Bay in the Marquesas » a été peinte sur place. Ces peintures de Hodges montrent l’influence de la pratique de prendre à bord des navires des profils côtiers : une technique pour laquelle les officiers ont été régulièrement formés. D’ailleurs l’enseignement était l’une des tâches de William Hodges sur le navire. Toutefois, ces œuvres sont remarquablement peu conventionnelles de la tradition artistique de la peinture de paysage et elles montrent singulièrement la tentative d’un artiste occidental se frottant pour la première fois aux effets de la lumière dans l’hémisphère Sud.

Le traitement pittoresque de Hodges des terres exotiques et son habileté dans le rendu des effets de lumière sont particulièrement illustrées par les tableaux comme  « Vue du Cap de bonne-espérance » , «Monuments sur le île de Pâques» et « Vue dans la province de Oparee, Tahiti ». Le premier a été peint in situ en 1772. Son travail pour l’Amirauté se termine à la fin de l’année 1778 et en 1779, il s’embarqua pour l’Inde.

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The « Resolution » in the Marquesas, 1774

Le canot en arrière-plan est d’un type connu dans les Marquises, et suggère que Hodges fait ce dessin d’un bateau, alors que la «Résolution» était à l’ancre dans la baie de Tahuata. En théorie, cette oeuvre doit dériver de la collection de l’Amirauté, mais de cette collection bon nombre des dessins des voyages de Cook ont été  par la suite dispersés et la provenance détaillée de celui-ci n’est pas connu. Il a été acheté pour le Musée de Colnaghi de Londres en juillet 1957 par l’Association pour la recherche marine (MacPherson Funds).

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Woman of Santa Christina – Drawn from nature by W. Hodges – Engraved by J. Hall – Published Feb. 1st 1777 London

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This finely engraved original antique print of a woman of Santa Christina Island was engraved by Robert Benard and was published in French edition of Cooks voyages in 1785

Lien :  William Hodges (1744 – 1797) © National Maritime Museum, Greenwich, London

Joline, a Hillyard Yacht 12 tonner aux Marquises

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« Dans l’après-midi du 9 mai 2002, nous quittons le sud de Tenerife, derrière « Joline », un bateau français en bois avec à bord Patrick, Viviane et leurs deux enfants, partis deux heures avant nous. Nous avions prévu de faire la traversée ensemble -c’est sympa d’avoir un voilier à proximité avec qui échanger impressions, infos diverses, voire poissons ! – mais après quelques échanges VHF, la nuit est tombée, et avant le matin nous nous sommes perdus de vue et de portée VHF définitivement, c’était réussi… (lu sur Bateaux autour du monde). »

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C’est un beau bateau très confortable mais moins rapide que les autres. Pas étonnant qu’ils se perdent de vue.

Le temps passe, la croisière continue…

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Un beau dimanche matin de février 2009, Patrick, Viviane et leurs trois enfants quittent Ua Pou (Marquises) pour tirer des bords sur le grand Océan et continuer ainsi leur tour du monde à bord de ce vieux et magnifique gréement en acajou et chêne.

Un 12 tonnes de 1960 construit en Angleterre construit par David Hillyard et acheté à Arcachon en 1968. Patrick charpentier de marine restaure le yacht et dès l’été 2001, le couple lève l’ancre de Belle île en mer pour une traversée de l’Atlantique avec un enfant à bord.

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Patrick, travaille aux escales plus ou moins longues selon le  temps qu’il faut  pour refaire la caisse de bord et  l’intérêt qu’offre le pays.

Canaries, Cap-Vert, Guyane, Venezuela, Trinidad et Tobago… puis la Colombie, traversée du canal de Panama retardée de quelques mois et les Marquises.

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En Guyane Patrick fabrique du mobilier moderne avec une nouvelle technologie.

A Trinidad, il remet à neuf  un bateau battant pavillon américain.

A Hiva Oa il fabrique avec une technique différente des savoir-faire locaux, un nouveau modèle de speed-boat dessiné par un architecte naval de Tahiti.

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L’équipage s’est consolidé en route avec l’arrivée d’un deuxième moussaillon né en 2002 au Cap-Vert et précédent le troisième  né quant à lui en 2006  au Vénézuela.

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Tapa, umu hei et monoi sur l’île de Fatu Hiva

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Dernier extrait du carnet de voyage de Paul Simier en Polynésie française. Au moment où les marins de l’Aranui 3 mettaient les baleinières à la mer, les falaises qui bordent le village de Omoa étaient noyées dans le brouillard. Le ciel, sombre et lourd, a soudainement craqué, libérant une trombe d’eau le temps que dure le débarquement. Puis le soleil est réapparu, comme au premier jour du monde.

La population de 600 habitants que compte Fatu Hiva, l’île située à l’extrême sud-est de l’archipel des Marquises, se partage entre Omoa et Hanavave, deux villages nichés dans des vallées ouvrant sur des baies que le cargo mixte ravitaille tour à tour.

À Omoa, les sculpteurs exposaient leurs oeuvres finement ciselées dans des bois durs et précieux ou encore dans des os de mammifères pour les plus petites pièces.

Comme il est d’usage dans tout l’archipel, le visiteur peut tout à loisir regarder, et toucher les pièces exposées sans que jamais on le pousse à acheter ni qu’on insiste de quelque façon. Chacun des artistes se fait un plaisir d’expliquer sa technique et d’échanger avec les visiteurs, y compris ceux qui n’ont aucune intention d’acheter.

Fabrication du tapa


Les croisiéristes de l’Aranui 3 se sont répartis autour de deux femmes du village pour une démonstration de fabrication de tapa. En langue marquisienne, le tapa désigne la feuille d’écorce que l’on utilise traditionnellement pour dessiner.

On obtient le tapa en décollant la partie intérieure de l’écorce de l’arbre. Selon l’essence d’arbre utilisée, la couleur varie du clair au foncé.

Une fois décollée, on assouplit la bande végétale à l’aide d’un maillet jusqu’à la rendre souple comme une peau de chamois. Une fois trempée et lavée, on la fait ensuite sécher pour obtenir une feuille rigide pouvant soutenir l’empreinte de l’encre.

Les tapas reproduisant des figures traditionnelles (guerriers, danseuses, statues et motifs de tatouages) figurent partout dans l’archipel des Marquises parmi les créations artisanales proposées aux touristes.

Le bouquet fleuri


Nous avons ensuite assisté à une démonstration de fabrication de umu hei, soit le bouquet fleuri que les Marquisiennes utilisaient jadis comme parfum.

Le bouquet fleuri se compose de plusieurs types d’herbes particulièrement odorantes que l’on parfume d’essence de bois (comme le santal). On les noue ensemble en y intégrant des tranches de fruits.

La femme intègre ce bouquet fleuri à sa longue chevelure nouée en conséquence. Quand le umu hei a fini de dégager ses parfums, il suffit de le renouveler.

Le musée local de Omoa renferme une belle collection de javelots ainsi que d’objets usuels également taillés dans le bois, comme des écuelles et des bassines de toutes les tailles.

L’escale à Omoa fut courte, le cargo mixte devant dans l’après-midi livrer sa marchandise à Hananave. Le temps que le repas soit consommé à bord, l’ Aranui 3 entrait dans la baie des Vierges.

Le paysage est tout simplement grandiose. Des pics aux formes phalliques montent vers le ciel. On raconte que le premier nom donné au lieu était la baie des Verges, appellation que les bons pères venus «civiliser» ces gens et leur enseigner la morale chrétienne trouvèrent choquante au point de la traduire en baie des Vierges.

Toute la population du village de Hanavave était là pour nous accueillir. Au centre communautaire, deux femmes ont, avec leurs seules mains et des outils rudimentaires, produit devant les visiteurs du lait de coco d’abord, que l’on extrait de la noix de coco fraîche, puis du monoi, l’huile que l’on extrait de la noix de coco séchée au soleil (appelée coprah).

Puis, une troupe composée de femmes, d’adolescents et d’enfants des deux sexes s’est mise à danser au soin des tambours que battaient des hommes.

Paul Simier – Journal de Montréal  2007

Des chevaux sauvages et un arboretum unique

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ILE D’UA HUKA, archipel des Marquises. L’escale de l’Aranui 3 à Vaipaee relève de la prouesse de navigation. Cette toute petite baie, aux allures de fjord, se trouve en effet protégée par une étroite passe dominée par des falaises abruptes. À peine y est-il entré que le cargo mixte pivote sur lui-même pour se mettre en position de départ.

Grâce aux deux baleinières du bord, deux équipes de marins se chargent d’amarrer les aussières de poupe sur les bollards fixés de part et d’autre de la falaise.

Sur les crêtes, curieux, des chevaux «sauvages» se manifestent brièvement, tandis que les chèvres, stoïques, continuent d’arpenter les étroits sentiers qu’elles ont dessinés sur les flancs de la montagne.

Une nouvelle fois, le transbordement vers le petit quai se fait en baleinière dans des flots cette fois un peu agités. Mais l’assurance et la fermeté des marins marquisiens sont de nature à rassurer chacun des passagers.

Aux abords de la mairie de Vaipaee, trois femmes se sont mises à danser sur les notes joyeuses du ukulélé (petit instrument à cordes). La cérémonie d’accueil est chaleureuse.

L’île d’Ua Huka ne compte que 584 habitants, regroupés dans 4 villages.

Les croisiéristes visitent le centre artisanal, puis le (très intéressant) petit musée (pièces archéologiques et artisanales de toutes les époques de la civilisation marquisienne).

Pendant ce temps, les organisateurs (venus à bord de l’Aranui 3) du Festival des arts des Marquises (mi-décembre 2007 sur l’île d’Ua- Pou) animent en plein air une réunion d’information à l’intention des dirigeants de l’île d’Ua Huka. Tous les échanges se passent en langue marquisienne.

Puis s’organise une caravane de véhicules 4×4, fleuris pour l’occasion. Les amateurs d’équitation, eux, ont déjà pris la route vers un autre village.

Mille variétés d’arbres
L’arboretum de l’île, qui s’étend sur une vingtaine d’hectares, rassemble un millier d’espèces et de variétés d’arbres, les unes endémiques des Marquises, les autres provenant de diverses régions du globe. Le nombre de variétés d’agrumes, à lui seul, dépasse les deux cents.

En compagnie du maire, une véritable encyclopédie en la matière et l’âme de cette réalisation, on parcourt les sentiers, non sans avoir dégusté à l’entrée diverses espèces de fruits cueillis pour l’occasion.

Balayée par les alizés, la côte sud de l’île d’Ua Huka, abrupte et rocheuse, est d’une beauté sauvage. Dans le fond des baies se nichent des plages. Sur les falaises, de petits troupeaux de chevaux s’ébattent en toute liberté. Le long de la côte, des îlots rocheux massifs montent la garde.

Le repas de midi est servi sous la forme de buffet au restaurant chez Céline Fournier, au village de Hane.

Sous les arbres se trouve un site archéologique avec ses tikis et autres pierres sculptées. Aux abords de la plage de Hane, un centre artisanal avoisine le petit musée de la mer où l’on a rassemblé notamment des vestiges de pirogues anciennes.

Le temps que certains passagers marchent jusqu’à un autre site archéologique offrant une vue sur la baie et que les autres profitent de la plage, l’Aranui 3 a mouillé dans la baie de Hane d’où se fait l’embarquement à l’aide des baleinières.

En quittant l’île d’Ua Huka, le navire frôle deux îles rocheuses où des oiseaux de mer – des sternes principalement – nichent par milliers. Le spectacle sous le soleil déclinant est saisissant.

Soirée polynésienne
À la fin de la journée se déroule la soirée polynésienne autour de la piscine du bateau. Le buffet est suivi de musique et de danses interprétées par des marins et des membres du personnel du navire.

Les passagers participent aussi à leur façon. Judith, de Québec (qui en est à sa troisième croisière à bord!), a composé et interprété pour l’occasion une chanson en hommage aux gens de l’Aranui 3.

Paul Simier – Journal de Montréal 2007

psimier@journalmtl.com

Un festin Chez Yvonne

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ILE DE NUKU HIVA, Marquises . Après avoir effectué deux escales six jours plus tôt sur l’île de Nuku Hiva, l’Aranui 3 y est revenu, cette fois dans la baie de Hatiheu, sur la côte nord de l’île.Un paysage à couper le souffle, deux sites archéologiques et un festin marquisien Chez Yvonne sont à inscrire au carnet de bord.

Quelques centaines d’habitants vivent dans ce village donnant sur la baie.

Le cargo mixte mouille à quelques encâblures du quai. Toutes les trois semaines, comme dans les autres villages des six îles habitées de l’archipel des Marquises, le bateau apporte les biens commandés à Papeete (et emporte les produits exportés vers Papeete, sur l’île de Tahiti).

Cela concerne aussi bien les matériaux de construction, par exemple, que les produits alimentaires introuvables sur l’île.

La routine de l’accostage


Dès que l’on mouille l’ancre, commence entre le bateau et le quai le ballet des deux barges du bord, alimentées par deux grues qui extraient des cales et du pont les plateaux, conteneurs et caissons contenant le fret.

Sitôt ce travail effectué, les marins, de sympathiques gaillards, d’origine marquisienne pour la plupart, prennent leur poste les uns sur l’échelle de coupée, les autres à bord des deux baleinières –à moins que ce ne soit à bord d’une grande barge munie de banquettes, quand il n’y a pas de houle–pour le transbordement des passagers.

Le paysage qu’offre la baie de Hatiheu est spectaculaire. Tandis que la vallée est noyée dans les plantations de cocotiers, un côté de la falaise est orné d’une succession de pics découpés comme de la dentelle, dont les détails se révèlent au fur et à mesure que change la luminosité, sous un ciel facilement nuageux.

Sites archéologiques
Deux sites archéologiques d’importance se situent dans les hauteurs à quelques dizaines de minutes du village. Dans ces lieux, restaurés pour l’occasion, s’est déjà déroulé le Festival des arts des Marquises, une manifestation authentique et grandiose organisée tous les quatre ans.

(Le 7e Festival des arts, du 16 au 20 décembre 2007, affiche complet depuis longtemps, tant à bord de l’Aranui 3 que sur l’île de Ua Pou, où il doit se dérouler.)

Le premier des deux sites est le tohua de Hikokua, lieu de rassemblement où se déroulaient autant les cérémonies sacrées que les jeux et les danses dans la société polynésienne de jadis.

Un peu plus haut, le site de Kamuihei est tout aussi spectaculaire avec ses roches gravées (pétroglyphes) et son gigantesque banian (une variété de ficus), arbre sacré dans la société polynésienne, qui compte 400 ans d’âge et environ 14 mètres de circonférence.

La visite de ces lieux, à 20 minutes de marche l’un à l’autre, s’effectue aisément, surtout avec la température fort agréable de la matinée.

Comme à toutes les escales, les organisateurs de l’Aranui 3 proposent toutefois aux voyageurs une alternative à la marche, un service de navette en véhicule tout terrain.

Chez Yvonne
Le repas de midi organisé pour les passagers de l’Aranui 3 était prévu dans le seul restaurant du village. Yvonne est une maîtresse femme, restauratrice mais également mairesse de Hatiheu.

En guise de repas, ce fut un véritable festin, qui a réuni une centaine de passagers. Une vingtaine de croisiéristes avaient choisi de ne pas débarquer. Ils ne savent pas ce qu’ils ont manqué!

Un groupe composé d’hommes du village s’est mis à jouer de la musique (tambour, ukélés et guitares) et à chanter en marquisien (une langue différente du tahitien).

Aux abords du restaurant, deux employés s’affairaient à faire griller de la langouste.

Le four marquisien

Le grand moment, avant que le repas commence, était prévu pour midi et demi. Cela faisait alors près de quatre heures que cuisait le plat principal et il s’agissait d’ouvrir le four traditionnel polynésien.

À l’aide de pelles, les employés du restaurant ont raclé la terre qui couvrait le four, une fosse rectangulaire creusée dans le sol. Leurs gestes devenaient plus précautionneux au fur et à mesure qu’ils voyaient apparaître la toile de jute protectrice.

Puis, sont apparues les feuilles de bananier et de pandanus qui recouvraient les deux cochons et les fruits (bananes rouges et fruits de l’arbre à pain).

La technique de ce four consiste tout simplement à faire chauffer au bois dans la fosse des roches volcaniques poreuses (qui n’éclatent pas), lesquelles permettent de cuire à l’étouffée les aliments ainsi enterrés.

La viande de porc ainsi cuite et les légumes qui l’accompagnaient étaient succulents, de même que la langouste grillée. Les plats de poisson cru et de beignets de crevettes, qui tenaient lieu d’entrées, étaient eux aussi délicieux.

Yvonne, elle, pendant que l’on servait la centaine de convives, avait l’œil à tout.

Tout le monde a mangé de bon appétit. Même les passagers français n’en revenaient pas de cette qualité et de cette opulence…

Paul Simier – Journal de Montréal 2007

psimier@journalmtl.com

Nuku Hiva, l’île capitale

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NUKU HIVA, îles Marquises (23 mai 2007) | Au petit matin, l’Aranui 3 se trouve à quai à Taiohae.

Ici se situent les services officiels chargés d’administrer l’ensemble de l’archipel des douze îles des Marquises, dont six sont habitées.

Dans la baie mouille une nuée de voiliers.

Les manoeuvres de débarquement du fret occupent toute la plateforme du quai où le ballet des commerçants de l’île commence autour des conteneurs; chacun, liste de commandes en main, inspecte la livraison.

Capitale


Face à la mer, à l’ombre des flamboyants, se succèdent les services: la poste, la gendarmerie, la mairie, etc.

Au centre artisanal sont exposées les habituelles créations artisanales. Les sculptures sur bois notamment sont superbes: cannes, statuettes (tikis), plats à fruits, etc. Les bijoux faits de nacre et de coquillages sculptés le sont tout autant.

Sous un abri au centre du village, des produits artisanaux, colliers de graines et tissus imprimés sur l’île, sont également exposés.

Une armada de véhicules tout-terrain appartenant aux membres de l’association des chauffeurs de taxi attend les passagers pour une balade d’une journée à travers l’île.

Baie cratère
La caravane s’ébranle vers les hauteurs de l’île par une route bétonnée en parfait état, pour finalement atteindre le col de Muake.

Une aire de pique-nique comprend des tables et un abri. C’est là que les membres de l’équipage ont apporté plats et boissons pour nourrir la centaine de passagers.

De là-haut, la baie révèle sa vraie nature. En forme de trois quarts de cercle, Taiohae se situe dans l’ancien cratère du volcan qui a constitué l’île. Le paysage est tout simplement grandiose.

La végétation est partout luxuriante. Vers l’intérieur, parmi les espèces tropicales poussent également des pins.

Le long de la route, des vaches ruminent ou paissent tranquillement. De nombreux chevaux vivent également en liberté.

La caravane de véhicules met ensuite le cap sur la vallée de Taipivai, où se situe un petit village. La rencontre de l’eau de la rivière et du courant de la marée y crée un impressionnant mascaret.

Sur le terrain de foot, c’est l’heure de l’exercice physique pour les jeunes de l’école locale.

Un autre centre artisanal rassemble là aussi les créateurs de la vallée. Les statuettes du sculpteur local sont attrayantes. Elles sont à l’image des tikis situés à flanc de montagne, que l’on atteint au terme d’une trentaine de minutes de marche.

Coco et coprah
Sur un versant, une vaste cocoteraie occupe la majeure partie du terrain. Il s’agit de la première ressource pour les gens de la vallée. La pulpe de la noix de coco, une fois séchée sur une plateforme ou dans un four rudimentaire quand persistent les pluies, forme le coprah.

Cette matière première, exportée à bord de l’Aranui 3 vers Papeete, sur l’île de Tahiti, sert à fabriquer l’huile de coco ( monoi) employée dans les produits cosmétiques, les savonnettes, les produits antimoustiques, etc.

Emballé dans des sacs de jute de 50 kilos, le coprah est payé l’équivalent d’un peu plus de 1 $ le kilo pour la première qualité, et de 0,80 $ le kilo pour la seconde qualité. La production varie tout simplement parce que les hommes s’adonnent à cette activité quand ils ne trouvent pas d’autre travail, m’a-t-on expliqué.

Parti sans ses passagers de la baie de Taiohae, le bateau mouille en baie de Taipivai. Pendant que les marins transfèrent à terre à l’aide d’une barge les marchandises destinées au village et chargent les sacs de coprah, les baleinières ont entamé leur navette pour rembarquer les passagers.

Ce soir, on met le cap sur l’île de Hiva Oa où nous avons rendez-vous avec deux personnages de légende : Paul Gauguin et Jacques Brel.

Paul Simier – Journal de Montréal 2007

psimier@journalmtl.com

Iles Marquises : Jojo et la Maison du jouir

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Deux génies ont fait connaître mondialement l’île de Hiva Oa (îles Marquises): le peintre Paul Gauguin, à la fin des années 1890, et le chanteur Jacques Brel, dans les années 1970. Tous deux ont vécu environ trois ans à Atuona et sont inhumés au cimetière de ce village.

Durant sa croisière de deux semaines dans l’archipel des Marquises, l’Aranui 3 fait escale à deux reprises, à deux jours d’intervalle, dans l’île de Hiva Oa, la première fois à Atuona, sur la côte sud, la seconde dans deux villages situés dans des vallées de la côte nord.

En fin de matinée, le cargo mixte est amarré au quai d’Atuona, situé à l’entrée de la magnifique baie des Traîtres. Aucun fait historique ne permet de retracer quelques traîtres que ce soit dans la région.

Pour interpréter cette étonnante dénomination, il faut plutôt se référer à la navigation à voiles carrées des premiers navigateurs, qui interdisaient de remonter contre le vent, d’où les eaux «traîtres» sans doute mentionnées sur les cartes anciennes, m’a expliqué Georges Gramont, propriétaire du Relais Moehau, petit hôtel familial situé à Atuona.

Georges, qui préside l’association touristique locale, est féru de l’histoire et de la culture des Marquises.

Dans le haut du village, au restaurant Chez Mamie, la centaine de passagers de l’Aranui 3 ont découvert une nouvelle fois la cuisine propre à l’archipel. Le buffet était tout simplement pantagruélique, combinant des spécialités marquisiennes, polynésiennes et chinoises.

Il faut préciser que les descendants des immigrés chinois, que l’on a fait venir pour fournir des bras aux plantations de coton au XIXe siècle, ont une grande influence tant culturelle qu’économique sur la Polynésie française.

La quête du «sauvage»
Au centre du village d’Atuona, au niveau de la mer, se trouve le centre culturel Paul Gauguin. Toutes les peintures exposées sont des copies réalisées par divers peintres de passage.

Il s’agit d’autoportraits de Gauguin et de quantité d’oeuvres de ses périodes polynésiennes (Tahiti et Marquises) et bretonne (Pont-Aven). Ces reproductions servent à retracer l’itinéraire de l’artiste dans une quête où il visait, obsessionnellement, à se rapprocher dans ses oeuvres du «sauvage» qui réside dans l’être humain.

Sur le terrain se dresse une reconstitution de la Maison du jouir, nom que l’artiste avait donné à sa demeure. Dans son atelier, une statue de cire de Gauguin montre l’artiste en train de peindre.

Le centre culturel abrite par ailleurs des cabanons conçus pour accueillir des artistes en résidence. La commune de Hiva Oa leur fournit le gîte à la condition qu’ils cèdent au moins une de leurs oeuvres réalisées sur place à la collectivité.

L’avion de Brel
Tout près du centre culturel Paul Gauguin se trouve un vulgaire hangar de tôle de couleur verte. Baptisé Espace Jacques Brel, le lieu évoque la vie et l’oeuvre du génial chanteur belge dont les chansons sont diffusées en continu.

Les panneaux d’information transpirent l’amateurisme, comme si l’héritage de Jacques Brel n’était pas pris ici en considération.

La pièce maîtresse figurant dans ce lieu est l’avion que possédait et pilotait Jacques Brel durant sa vie aux Marquises. Baptisé Jojo, du sobriquet de son ami de toujours, l’avion a été entièrement restauré par des experts français.

Grâce à cet avion, Brel avait réussi à s’intégrer à la vie des Marquises, assurant le transport urgent de biens et de personnes vers Papeete, la capitale territoriale, distante de près de 1 500 kilomètres.

Jacques Brel, en se retirant à Hiva Oa, voulait d’abord fuir les paparazzis qui le pourchassaient depuis qu’on le savait malade. Aux Marquises, il était quasiment inconnu, comme en témoigne cette anecdote que m’a rapportée Pascal, un Marquisien de l’île de Ua Pou, qui la tient de bonne source.

Dès que les Marquisiens se réunissent, rapidement sortent les tambours, les ukélés et les guitares. Un jour, Jacques Brel se joint à un groupe. «Tu joues de la guitare?» lui demande-t- on. Et Brel de se mettre à chanter sa fameuse Amsterdam. À la fin de la chanson, l’accueil fut poli, mais on lui a repris la guitare qui fut passée à un Marquisien pour qu’il joue de la «vraie» musique…

Les tikis de Puamau
Sur son trajet de retour, l’Aranui 3 a mouillé successivement en baie de Puamau et de Hanaiapa, sur la côte nord de Hiva Oa.

Là, un site archéologique abrite les plus grands tikis de Polynésie. Ces statues sculptées dans la pierre volcanique représentent, dans la croyance polynésienne, des dieux ou des héros divinisés.

Paul Simier – Journal de Montréal

psimier@journalmtl.com

Deux tombes fleuries

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Deux génies ont fait connaître mondialement l’île de Hiva Oa: le peintre Paul Gauguin, à la fin des années 1890, et le chanteur Jacques Brel, dans les années 1970.

Deux tombes fleuries
Pour l’admirateur de ces deux artistes, les moments d’émotion surgissent au cimetière du Calvaire d’Atuona, qui domine la baie des Traîtres.

On y accède par un chemin pentu en béton. La tombe de Jacques Brel est située près de l’entrée. Ombragée par des arbustes aux feuilles folles, il s’agit d’une simple surface de terre battue où les admirateurs laissent des fleurs sauvages, d’ibiscus ou de tiaré, ou encore des colliers de coquillages. Sur la pierre frontale est apposé un médaillon où se trouve sculpté le portrait de Jacques Brel en compagnie de sa compagne Madly.

Trois rangées plus haut se trouve la tombe de Paul Gauguin. Sur une roche volcanique, on a tout simplement gravé grossièrement «Paul Gauguin 1903». Le monument funéraire se compose de roches naturelles de couleur rougeâtre et forme un ensemble massif. Un frangipanier a poussé à l’extrémité de la tombe. À un angle du monument est scellée une reproduction de la statuette baptisée Oviri (qui signifie «sauvage» en tahitien) que Gauguin avait expressément demandé que l’on installe sur sa tombe. Là aussi sont accrochés quelques colliers de coquillages offerts par des admirateurs, ainsi qu’une petite roche gravée offerte par une admiratrice slovaque.

Une fois descendu du cimetière, comme le service de navette vers le quai avait pris fin, j’ai été pris en charge par une famille de Réunionnais (lui est enseignant en mécanique à Atuona) qui s’en allait prendre un verre à bord de l’Aranui 3.

«Toutes les trois semaines, lorsque le bateau fait escale, cela constitue pour nous une sortie, car on a vite fait le tour des bars et des restaurants d’une île de 2 285 habitants», m’ont-ils expliqué au bar de l’Aranui 3, où officiaient les joviaux Yoyo et Steeven.

Paul Simier – Journal de Montréal
psimier@journalmtl.com

Renaissance culturelle

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La première terre marquisienne que l’Aranui 3 a abordée ce matin, nimbée de nuages lourds, paraissait bien mystérieuse. De temps à autre, l’un ou l’autre de ses nombreux et spectaculaires pics de basalte arrivait quand même à émerger du ciel laiteux.

À peine le navire a-t-il accosté au quai de Hakahau que les manoeuvres de débarquement du fret commencent. À terre, les commerçants sont venus prendre livraison des commandes qu’apporte l’Aranui 3.

Les passagers descendent à leur guise, pressés pour la plupart d’aller découvrir ce côté de l’île. Un chemin mène, au terme d’une quarantaine de minutes de marche, au sommet de la butte qui domine le port, la baie et le village.

La vue est saisissante, surtout lorsque l’un des pics qui émergent de la montagne sur ce côté de l’île se dégage des nuages.

Hakahau…
La centaine de passagers s’égaient le long de la plage où les artisans sont venus exposer leurs créations sous une grande paillote: bois sculpté, bijoux de nacre, os sculptés, colliers de graines multicolores.

L’église catholique renferme une massive chaire sculptée dans un bloc aux formes d’étrave de bateau de pêche au pied duquel s’étale un filet rempli de poissons.

Au bureau de poste, le système Internet est en panne. Le marchand d’appareils électroniques qui offre également ce service n’est pas décidé à ouvrir tout de suite, ayant encore des commandes à aller chercher au bateau, nous précise-t-il.

En fin de matinée, à l’ombre d’un arbre à pain, une troupe de musiciens et de danseurs a vite convaincu les spectateurs que ce qu’ils interprètent n’est pas du folklore à bon marché. Chanter et danser sur les rythmes ancestraux fait ici à nouveau partie de la vie quotidienne.

À midi, le repas est servi Chez Tata Rosalie, une vénérable Marquisienne dont la famille a préparé diverses spécialités de l’île, soit de la pieuvre, du poisson cru mariné, de la viande de porc accompagnée de deux sortes de bananes, de fruits de l’arbre à pain et de riz, et enfin un dessert au lait de coco. C’est un véritable et authentique festin marquisien.

… et Hakahetau
Le navire a largué les amarres en début d’après-midi pour mouiller l’ancre une heure plus tard dans la baie de Hakahetau. Dans ce petit hameau, quelques artisans sont également présents au rendezvous pour présenter leurs produits.

Adrien et Nadia – qui vont sans doute se marier en juillet prochain – font griller des brochettes. Sur une table, du jus de noni est proposé à la dégustation.

Ce produit aurait toutes les vertus, croient les gens de l’île qui cultivent ce fruit. C’est également ce que croient les Américains qui achètent la production de noni à travers toute la Polynésie.

Paul Simier – Journal de Montréal
psimier@journalmtl.com